CORSAIRES EN OCEAN INDIEN AUX
XVIIIème et XIXème SIECLES |
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Le rôle décisif du gouverneur Mahé
de Labourdonnais C’est le maloin François Mahé de Labourdonnais,
nommé gouverneur général de l’ile de France (aujourd’hui Ile
Maurice) et de l’île Bourbon (aujourd’hui la Réunion) en 1735,
qui conçut l’idée de leur donner à toutes deux « un air de
flibuste », comme il le dit si joliment dans un mémoire présenté au
ministre ORRY en 1740. En réalité, l’expression, pour être pittoresque,
convient mal. La flibuste, en effet – laquelle n’était que de la piraterie
déguisée – avait complètement disparu aux Antilles depuis la fin de la guerre
de la succession d’Espagne. Dans l’océan Indien, les derniers flibustiers
venant des Antilles, regroupés à Madagascar vers 1685, avaient disparu, eux
aussi, ou bien s’étaient amendés et installés comme colons à Bourbon. En
1730, il n’existait plus que quelques réfractaires qui étaient allés se
joindre aux pirates Angrias sur la côte de Malabar pour attaquer les navires
d’Europe. Ce que Labourdonnais avait en vue, c’était de faire
de l’ile de France en particulier une base de corsaires authentique, à
l’exemple de son Saint-Malo natal, ou encore de Dieppe ou de Dunkerque. Ce
point de vue rencontrait pleinement celui du fondateur de Pondichéry. Pour cela l’île avait tout ce qu’il fallait :
deux ports biens situés, à l’est et à l’ouest, des bois convenant pour la
construction navale, pas d’autochtones hostiles, mais des lafres (1) importés
d’Afrique facilement transformables en « noirs de marine » ;
enfin à proximité dans l’île Bourbon, des montagnards habitués à la chasse
depuis l’enfance et qui faisaient d’excellents tireurs. Quant aux colons de
l’île de France, elle-même, il ne fallait pas trop compter sur eux. C’était
une population indocile, remuante et querelleuse, mais Labourdonnais espérait
bien la discipliner à la longue. L’obstacle principal – et il était de taille –
était la compagnie des Indes elle-même. Elle voyait très bien, au début, les
avantages que pouvait procurer la course maritime aux Mascareignes, en temps
de guerre. Plus tard, elle changea d’avis. Elle crut pouvoir, au moyen d’un
pacte de non-agression conclu avec sa rivale anglaise (l’Est India Compagny),
s’assurer que ses navires ne seraient pas attaqués dans les mers d’Asie, en
cas de conflit européen. C’est pourquoi elle ne soutint pas ce qu’elle
appelait « les rêves guerriers » de Labourdonnais. Or, c’est lui qui voyait juste, et la suite des
évènements lui donna raison. Lorsqu ‘éclata la guerre de la succession
d’Autriche, les officiers de la Royal Navy, qui n’étaient aucunement liés par
une convention passée avec de simples marchands, n’hésitèrent pas à attaquer
les navires français. L’Angleterre déclara la guerre à l’Espagne dès
octobre 1739. La France, alliée de l’Espagne, n’entra pas
immédiatement en guerre, la marine française n’étant pas encore prête. C’est
seulement en mars 1744 qu’elle ouvrit les hostilités contre l’Angleterre. En
moins d’une année, le commerce français fut anéanti dans l’Inde, à
l’exception de trois vaisseaux. Au prix d’efforts considérables, Labourdonnais
parvint à réunir au Port-Louis sept navires de la compagnie qui allèrent se
ravitailler à Madagascar en attendant de pouvoir être expédiés dans l’Inde.
S’y joignirent cinq vaisseaux armés en guerre en provenance de France, avec
l’ordre à Labourdonnais d’en prendre le commandement. Cet armement était destiné en priorité à porter du
numéraire à Pondichéry, qui avait toujours la côte d’amour à Paris, ensuite à
faire la course contre les navires marchands anglais, en représailles des
attaques contre le commerce français. Cela marque le début réel de l’utilisation des Mascareignes comme base
de départ pour des opérations de courses en temps de guerre.
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Les corsaires « indiens » au temps de la Royauté Ø Les origines de la guerre de course Ø Le rôle décisif du
gouverneur Mahé de Labourdonnais La course aux Indes sous la révolution et l’Empire Ø Vie du corsaire François Ripaud de Montaudevert |
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